Calculs thermiques : la bonne méthode

Différentes méthodes de calculs thermiques peuvent être utilisées lors des phases de conception afin de définir le niveau de performance énergétique du projet.

Certaines d’entre elles, établies à partir d’outils spécifiques, sont imposées par la réglementation notamment pour les constructions neuves mais également pour certaines réhabilitations.

Toutes ces méthodes n’aboutissent bien souvent pas aux mêmes résultats mais toutes nécessitent une saisie rigoureuse des données du projet pour se rapprocher des conditions réelles de fonctionnement. Il convient alors de bien saisir l’utilité de chacune d’elles pour en faire le bon usage !

D’autre part les moyens nécessaires pour l’atteinte des objectifs de performance énergétique ne doivent pas être sous-estimés. Ils doivent être identifiés et écrits lors des phases de conception sans quoi les résultats ne seront pas à la hauteur des objectifs !

Réglementation Thermique et consos réelles

Les outils règlementaires RT 2012, ne permettent pas d’obtenir une prévision fine des consommations réelles. Les hypothèses conventionnelles de ce calcul resteront toujours en décalage avec la réalité du terrain. En effet, les données d’entrées, fixées par défaut, ont pour conséquence de sous-estimer structurellement les consommations de chauffage en considérant que :

  • les gens se chauffent à 19°C avec un ralenti de jour à 16°C,
  • personne n’ouvre les fenêtres pour aérer,
  • les bâtiments de « bureaux » n’ont pas de besoins en eau chaude sanitaire,
  • etc,…

Ce calcul obligatoire peut néanmoins servir de base comparative entre 2 scénarios.

Simulation Thermique Dynamique : les donnée d’entrée

Les outils de Simulation Thermique Dynamique (STD), plus adaptés à la réalité, permettent de s’approcher au mieux des conditions réelles de fonctionnement. En effet, la saisie des données d’entrées est laissée libre à l’utilisateur, ce qui permet de se rapprocher au mieux des conditions réelles. Ces données d’entrées, qui doivent être renseignée avec rigueur, concernent :

  • les données météorologiques du site,
  • la modélisation du bâtiment (caractéristiques thermique de l’enveloppe, étanchéité à l’air,…),
  • les horaires d’occupation du bâtiment,
  • le niveau de confort des différentes zones,
  • les sources de chaleur internes liées aux matériels électroniques et aux usagers, etc

Ces simulations représentent un coût et bien souvent elles ne sont utilisées que pour la conception de bâtiments dont les objectifs énergétiques sont très ambitieux ou pour simuler et améliorer le confort d’été.

Autres modes de calcul des déperditions

D’autres outils de calcul de déperditions, souvent conçus en interne par les bureaux d’études, permettent de se rapprocher des consommations réelles. Il est d’ailleurs recommandé, dans le cas où une simulation thermique dynamique n’est pas envisagée ou pas nécessaire, de prévoir ce type de prestation en complément du calcul réglementaire. Ceci doit être stipulé clairement au maître d’œuvre.

Définition des objectifs en phase de conception

Dans tous les cas, il est important que la définition des moyens de mise en œuvre et de contrôle soit bien prise en compte dans les phases de conception. Les prescriptions techniques issues de la conception doivent traduire le niveau de performance attendu. Elles doivent être suffisamment détaillées dans le cahier des charges notamment concernant les notions relatives à la conception même du projet. Nous pouvons citer par exemple :

  • Le zonage : il s’agit de définir les différentes zones qui présenteront des usages différents (horaires d’occupation, températures de consignes…) et qui donc pourront être régulées de manières différentes afin de limiter les consommations inutiles. Les systèmes de chauffage doivent donc être conçus afin de permettre cet ajustement, avec si possible le regroupement dans le projet des zones de caractéristiques similaires.
  • L’étanchéité à l’air : plus un bâtiment est étanche à l’air, plus les consommations de chaleur seront maîtrisées. L’objectif d’étanchéité à l’air est défini dès la phase de conception. Des infiltrations parasites non maitrisées auront des conséquences sur les consommations réelles du bâtiment. Les moyens pour garantir le résultat doivent être considérés lors des phases de conception (traitement des points singuliers, détail architectural, test d’étanchéité à l’air…). Il n’est pas rare que l’objectif d’étanchéité à l’air défini lors de la conception soit en décalage avec les moyens mis en œuvre pour y parvenir, ce qui entraine des consommations supplémentaires.

L’exemple d’un bâtiment tertiaire de bureaux + salles de réunions

  • Construction neuve
  • Altitude : 900m
  • Performance énergétique : BBC RT2005
  • Surface : 1 564 m² (R+2)
  • Systèmes : chaudière bois granulé, Eau Chaude Sanitaire électrique, CTA Double Flux
  • Livraison : 2016

La consommation prévisionnelle de chauffage issue du calcul RT2005 était de 61 500 kWh/an.

La consommation réelle moyenne mesurée sur les 3 années suivant la réception est de 80 000 kWh/an, soit près de 30% au-delà de l’objectif prévisionnel, après correction pour tenir compte de la rigueur climatique différente d’une année sur l’autre.

Pour ce projet, la surconsommation par rapport aux prévisions s’explique par :

  • des températures de consignes mesurées dans différentes zones plus élevées que celles considérées dans le calcul théorique,
  • une conception des réseaux qui ne permet pas de réguler de manière distincte les différentes zones contrairement au scénario du calcul prévisionnel :

Situation réelle

Situation optimisée (correspondant aux calculs théoriques)

En effet, les panneaux rayonnants au plafond de la grande salle de réunion du rez-de-chaussée se situent sur le même circuit hydraulique que celui des panneaux rayonnants du reste du bâtiment (composé essentiellement de bureaux) comme sur le schéma de gauche ci-dessous. Il est donc impossible de réguler de manière différentes les circuits de ces deux zones (ni pour la température de départ, ni pour la programmation horaire qui font pourtant partie des données d’entrée des outils de calcul). La température de départ du circuit de la salle de réunion devant être plus élevée que celle du circuit des bureaux (du fait d’une configuration qu’il lui est propre : grand volume, surface de baies importante), cela entraine inévitablement des consommations supplémentaires. Ce phénomène est également amplifié lorsque la salle de réunion est utilisée en dehors des périodes d’occupation des bureaux. Cet élément non pris en compte lors de la conception contribue donc à augmenter l’écart entre les consommations réelles et les consommations théoriques.

La séparation hydraulique des deux circuits avec deux départs distincts en chaufferie (schéma de droite ci-dessus) aurait permis d’ajuster au mieux les consommations par rapport aux besoins et ainsi de se rapprocher des consommations prévisionnelles.

  • une mauvaise étanchéité à l’air de certaines menuiseries :

Pour certains bureaux (angle sud/ouest) des infiltrations d’air importantes ont été identifiées au niveau des menuiseries entrainant un inconfort important ayant conduit certains usagers à installer des convecteurs électriques pour obtenir une température ambiante satisfaisante. Le manque de cales de maintien lors de la pose des châssis est à l’origine de cette anomalie entrainant un fléchissement de la menuiserie et donc une rupture de l’étanchéité. Les jonctions sensibles à l’étanchéité à l’air (plancher-murs, menuiseries-mur…) n’ont pas été traitées lors des phases de conception, ce qui contribue à augmenter l’écart entre les consommations réelles et théoriques.

  • Conclusions :
    • Un objectif d’étanchéité à l’air nécessite sa prise en compte dès la phase de conception du projet, notamment pour l’interaction entre les corps d’état, et de mettre en œuvre des moyens de contrôle pendant le chantier : tests intermédiaire permettant d’identifier les défauts et de les corriger au fur et à mesure.
    • Une sensibilisation et une responsabilisation des intervenants est également nécessaire en amont pour une bonne prise en compte de ces objectifs et identifier les moyens mis en œuvre.
    • Le paramétrage des températures de consignes impacte fortement les consommations de chauffage
    • Les scénarios d’occupation doivent être identifiés en amont du projet, afin de différencier les zonages et d’adapter leur régulation de chauffage.